quarta-feira, 16 de julho de 2014

Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre et la liturgie de 1962

Présentation La liturgie de 1962

La Fraternité et la liturgie

Le but de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre est la sanctification des prêtres moyennant l'exercice du sacerdoce, principalement en conformant leur vie au très Saint Sacrifice Eucharistique, « par l'observance des traditions liturgiques et spirituelles »[1]. Ainsi « l'usage des livres liturgiques en vigueur en 1962 est concédé aux membres de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre ainsi qu'aux autres prêtres, qui sont hôtes dans les maisons de la Fraternité ou qui exercent un ministère sacré dans les églises de celle-ci »[2].
L'usage du rite romain « traditionnel » (également appelé « tridentin » ou « de Saint Pie V[3] »), tel qu'il était en vigueur dans l'Eglise latine avant la réforme de 1969, est une particularité de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre. Il convient donc de développer un peu les raisons de cet attachement à cette manière de célébrer que beaucoup connaissent peu ou mal.

La liturgie dans l'Eglise

« L'ensemble du culte que l'Eglise rend à Dieu », écrivait le Pape Pie XII dans l'encyclique Mediator Dei, « doit être à la fois intérieur et extérieur. Extérieur, certes, car tel le requiert la nature de l'homme, composé d'une âme et d'un corps car la Providence divine a voulu que par la connaissance des réalités visibles, nous soyons attirés à l'amour des réalités invisibles. (...) Mais l'élément essentiel du culte doit être l'intérieur, car il est nécessaire de vivre toujours dans le Christ, de lui être tout entier dévoué, pour rendre en lui, avec lui et par lui, gloire au Père des cieux »[4]. Ainsi les « réalités sensibles peuvent devenir le lieu d'expression de l'action de Dieu qui sanctifie les hommes, et de l'action des hommes qui rendent leur culte à Dieu »[5]. L'Eglise, épouse du Christ, guide la main de ses enfants dans la prière liturgique.
On définit alors la liturgie, selon la Constitution Sacrosanctum Concilium, comme « l'exercice de la fonction sacerdotale de Jésus Christ, dans lequel la sanctification de l'homme est signifiée par des signes sensibles et réalisée d'une manière propre à chacun d'eux, dans lequel le culte public intégral est exercé par le corps mystique de Jésus-Christ, c'est à dire par le Chef et par ses membres »[6].
Dans la prière liturgique, les membres de l'Eglise s'insèrent dans le culte rendu par le Fils au Père. « Par conséquent, toute célébration liturgique, en tant qu'œuvre du Christ prêtre et de son Corps qui est l'Eglise, est l'action sacrée par excellence dont nulle autre action de l'Eglise n'égale l'efficacité au même titre et au même degré »[7].
Les signes liturgiques se composent du signe essentiel, nécessaire à la validité sacramentelle, et des signes secondaires qui en sont comme l'écrin qui le contiennent. Tous ces gestes et paroles sacrés désignent une réalité de grâce, mystérieuse et transcendante, en la rendant présente, efficace et fructueuse.
« Le mystère de la Messe est au-dessus de ses expressions liturgiques. Si légitimes et nécessaires soient-elles, elles lui demeurent par nature inadéquates. Elles ne représentent que des vérités partielles ; une tension va se créer entre elles. Faut-il d'abord insister dans la liturgie sur le rôle primordial, enveloppant, souverainement efficace du sacrifice du Christ ? Faut-il au contraire mettre l'accent sur le rôle secondaire du sacrifice de l'Eglise et la participation des fidèles ? (...) Faut-il adorer en silence le mystère ineffable de la rédemption du monde, rendu présent au milieu de nous ? Faut-il le faire acclamer par la foule ? (...) On le voit, les tensions qui ont donné naissance aux divers rites reparaissent à l'intérieur d'un même rite. Au regard de la foi et de la contemplation, le mystère de la rédemption continué en chaque Messe est un, parfait, immuable, infiniment simple, embrassant dans son horizon l'universalité du temps et de l'espace, absolument transcendant par rapport à ses formes liturgiques qui ne peuvent avoir qu'une valeur secondaire. Mais le bon ordre et la vie de la communauté ecclésiale ont besoin précisément de ces formes liturgiques »[8].

La liturgie traditionnelle

La liturgie tridentine est une des formes liturgiques de l'Eglise. Codifiée après le concile de Trente, « en des temps vraiment difficiles où, sur la nature sacrificielle de la messe, le sacerdoce ministériel, la présence réelle et permanente du Christ sous les espèces eucharistiques, la foi catholique avait été mise en danger, il fallait avant tout, pour Saint Pie V, préserver une tradition relativement récente[9], injustement attaquée, en introduisant le moins possible de changements dans le rit sacré... » Le n° 7 du préambule, rajouté en 1970, de l'Institutio Generalis du missel réformé décrit ainsi le contexte de la réforme tridentine, et par le fait même les atouts du missel tridentin. Alors, aujourd'hui où la foi et la piété eucharistique diminuent, il est permis de poser la question : une des réponses aux insuffisances théologiques, catéchétiques, spirituelles et pastorales des chrétiens aujourd'hui, n'est il pas la célébration du mystère eucharistique en usant des formes liturgiques du missel de Saint Pie V ?
La liturgie traditionnelle, en effet, exprime avec acuité la présence du sacrifice de la croix, oriente notre âme vers Dieu et témoigne de notre adoration envers sa présence réelle. Bien sûr il ne faut pas voir dans la messe un cours de théologie, mais la doctrine se trouve exprimée dans ses différentes prières. On retrouve ainsi clairement exprimées les quatre fins du Saint Sacrifice : adoration, action de grâce, propitiation, demande.
Il est normal que les prières de la messe soient orientées vers l'adoration, parce que l'homme en tant que créature doit d'abord reconnaître sa totale dépendance vis-à-vis de Dieu, et que c'est là la fin première du Sacrifice. Remarquons ensuite que la plupart des oraisons du missel de 1962, ainsi que différentes prières de l'offertoire et du canon, sont de ferventes demandes de grâces à Dieu, la première de ces demandes étant que Dieu daigne accepter ce sacrifice. Les prières de l'offertoire montrent bien le caractère propitiatoire de l'offrande qui est faite, Jésus Christ immolé pour nos fautes, afin que la Rédemption s'accomplisse. C'est tout cela qui est explicité, entre autre, par le si riche Offertoire traditionnel.
Il faut également remarquer que le rite tridentin, à l'image de la fumée de l'encens montant vers le ciel, élève nos âmes jusqu'à Dieu et, nous faisant passer des réalités sensibles aux mystères éternels, nous permet, dès ici-bas, d'unir nos voix à celles des bienheureux. Tous les gestes, toutes les cérémonies existent dans ce but. L'orientation de l'autel, les gestes d'adoration, la langue sacrée, le mystère et le silence qui entourent la consécration, etc. : tous ces aspects manifestent bien le caractère sacré de la messe.
N'est-ce pas parce qu'il est ministre de l'Eglise, comme nous l'avons dit plus haut, que le prêtre va, par exemple, utiliser dans sa fonction sacrée, une langue qui n'est pas sa langue maternelle, mais qui est la langue de l'Eglise dont il est ici l'ambassadeur ? En effet la langue utilisée dans la liturgie tridentine est le latin[10]. La plupart des prières de la messe datent des premiers siècles de notre ère chrétienne. Ainsi il est couramment admis que le Canon (la prière centrale du Sacrifice Eucharistique) a été fixée de manière quasi définitive dès la fin du IVème siècle[11] ! En 1570, le pape Saint Pie V n'a donc pas « composé » un nouveau missel : il a simplement harmonisé des prières et des rites qui lui étaient bien antérieurs.
Le silence est quant à lui, l'expression la plus belle de notre adoration envers le Dieu qui descend sur nos autels. Il est de plus très expressif du mystère qui se réalise. Comme nous l'enseigne St Ignace d'Antioche, le silence accompagne le mystère : « la virginité de Marie, son enfantement et la mort du Seigneur sont trois mystères éclatants que Dieu opéra dans le silence ». Le silence au moment du canon est ce qui favorise le mieux une participation vraiment profonde, personnelle et intérieure au mystère de l'autel.
La musique tient néanmoins une place de choix dans la liturgie classique : c'est pour être à son service et l'embellir que le grégorien et la polyphonie sacrée se sont développés au cours des siècles.

Un héritage... à transmettre

La liturgie utilisée par les prêtres de la Fraternité Sacerdotale Saint Pierre est enfin un héritage ; elle est, de par son origine, l'expression de la piété et de la sainteté de l'Eglise. Nombreux sont les saints qui l'ont goûtée et ses bienfaits sont encore visibles aujourd'hui : sa richesse surprend chaque jour ceux qui la pratiquent. Elle est une aide précieuse pour nous conduire à Dieu tout au long de notre pèlerinage ici-bas. Le pape Jean-Paul II, dans un message adressé à l'Assemblée plénière de la Congrégation pour le Culte Divin et la discipline des sacrements, qui s'est tenue au Vatican en septembre 2001, a ainsi déclaré : « Le peuple a besoin de voir dans les prêtres et les diacres une attitude pleine de révérence et de dignité, capable de l'aider à pénétrer les choses invisibles, même sans beaucoup de paroles et d'explications. Dans le missel romain, dit de saint Pie V, ainsi que dans les diverses liturgies orientales, l'on trouve de très belles prières par lesquelles le prêtre exprime un sentiment très profond d'humilité et de révérence en présence des saints mystères : celles-ci révèlent l'essence de toute liturgie ».
Voici donc en quelques mots - et de manière bien sommaire - exposées les raisons de l'attachement de la Fraternité Sacerdotale Saint Pierre au rite Romain classique. Nous avons essentiellement évoqué ici la liturgie de la Messe, mais les membres de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre disposent de l'usage de tous les livres liturgiques en vigueur en 1962[12] (Missel, Bréviaire, Rituel, Pontifical et Cérémonial des Evêques). C'est une richesse que l'Eglise leur confie comme un trésor : à l'exemple du bon intendant de l'Evangile, ils veulent le défendre, en vivre et le transmettre aux générations futures.

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[1] Constitutions de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre, art. 8 ; voir également la Lettre Apostolique Ecclesia Dei Motu Proprio de S.S. le pape Jean-Paul II, 2 juillet 1988.
[2] Décret d'érection de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre, 18 octobre 1988.
[3] Le pape Saint Pie V (1566-1572), appliquant les décrets du Concile de Trente qui avaient souhaité la révision des livres liturgiques, publia une édition typique du Bréviaire (1568) et du Missel (1570). Le dessein du pape, fidèle dépositaire des intentions du Concile, n'était pas de composer des livres liturgiques nouveaux, mais de ramener la prière de l'Eglise à l'antique tradition des Pères et d'établir l'unité dans la célébration des rites.
[4] Pie XII, Encyclique Mediator Dei, 20 novembre 1947, 23.
[5] Catéchisme de l'Eglise Catholique, 1148.
[6] Concile Vatican II, Sacrosantum Concilium, 7.
[7] Concile Vatican II, Sacrosantum Concilium, 7.
[8] Cardinal Charles Journet, La messe présence du sacrifice de la Croix, DDB, 1961, p. 317-319.
[9] Le pape Paul VI, dans la constitution Missale Romanum qui précède ce texte, la fait tout de même remonter à Saint Grégoire le Grand !
[10] « La langue de l'Eglise doit non seulement être universelle mais immuable. Si en effet les vérités de l'Eglise catholique étaient confiées à certaines ou à plusieurs langues humaines changeantes dont aucune ne fait davantage autorité sur une autre, il résulterait une telle variété que le sens de ces vérités ne serait ni suffisamment clair ni suffisamment précis pour tout le monde. » Jean XXIII, Veterum Sapientiæ, 1962.
[11] Joseph-André Jungmann, Missarum Sollemnia, Aubier, 1951, t. 1, p. 81.
[12] Decret accordant l'usage de tous les livres liturgiques en vigeur en 1962, 10 septembre 1988 ; voir également Décret d'érection de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre, 18 octobre 1988.

http://www.fssp.org/fr/liturgie1962.htm